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Donner une réponse à l’absence d’antimatière
Physique des particules
Neutrinos
Cosmologie
Astroparticules
L'antimatière, ce n'est pas de la science-fiction. Pour chaque particule de matière, il existe en effet une antiparticule, de même masse et même durée de vie, mais de charge électrique opposée. La théorie du Big Bang implique qu’autant d’antimatière que de matière a été créée à l’origine de l’Univers. Pourtant, l’antimatière est quasi absente de notre monde. L’énigme de cette absence passionne les physiciens et physiciennes depuis soixante-dix ans
Dans les collisions de particules
La physique des particules prévoit des différences de comportement...
Matière et antimatière, lorsqu'elles se rencontrent, s'annihilent en produisant de l’énergie, selon la célèbre formule E = mc2, par exemple sous forme de photons. En toute logique, donc, dans un univers constitué initialement pour moitié de matière et d’antimatière, les deux espèces auraient dû intégralement s’annihiler. Comment est-il alors possible que nous existions ? Le modèle standard de la physique des particules prédit de subtiles différences dans les interactions de certaines particules, faisant ainsi pencher la balance en faveur de la matière.
... mais elles se sont révélées insuffisantes jusqu’à présent
Ces différences ont par exemple été étudiées sur les mésons B, assemblages d’un quark et d’un antiquark, l’un des deux étant un quark (ou un antiquark) beau. En comparant donc les propriétés des mésons B constitués d’un quark beau et d’un antiquark et ceux constitués d’un antiquark beau et d’un quark, les expériences BaBar aux États-Unis, Belle au Japon puis LHCb au CERN ont en effet trouvé une infime différence. C’est une belle confirmation du modèle standard, mais malheureusement la différence est trop faible pour expliquer la disparition de l’antimatière dans l’Univers.

Le détecteur LHCb au CERN teste les diérences de comportement entre matière et antimatière
crédits : Cyril FRESILLON/LHC/CNRS Photothèque

Détecteur de neutrinos ProtoDUNE. Prototype à l'échelle 1/60e du futur détecteur DUNE
crédits : CERN -

L’étude des neutrinos pourrait fournir une réponse
Les neutrinos et antineutrinos pourraient également avoir une différence de comportement qui, même infime, serait suffisante pour expliquer la prédominance de la matière dans l'Univers. Cependant, l’étude des neutrinos est compliquée et les expériences peinent à conclure. L’expérience T2K au Japon a récemment publié des résultats préliminaires prometteurs. D’autres expériences telle que DUNE aux États-Unis sont en préparation et pourraient apporter bientôt des observations majeures
Dans le cosmos
L’antimatière pas si rare dans le vide de l’espace
Perchée sur la station spatiale internationale, l’expérience AMS scrute les rayons cosmiques à la recherche d’antiparticules. Elle a mis en évidence un excès de positons (des antiélectrons) par rapport à ce qui était attendu dans le flux de rayons cosmiques. Il pourrait s’agir d’antimatière produite par des pulsars, des étoiles à neutrons en rotation très rapide sur elles-mêmes, qui émettraient électrons et positons dans le cosmos ! Ce n’est pas tout : AMS a également détecté des antiprotons, particules d’antimatière créées lors des collisions des rayons cosmiques dans le milieu interstellaire.

Le détecteur AMS installé dans l’espace à bord de la station spatiale
crédits : NASA

Et si matière et antimatière s’étaient tout simplement séparées dans l’Univers
L’hypothèse que notre Univers soit découpé en zones distinctes de matière et d’antimatière a été étudiée dans les années 1990. À l’interface de telles zones, d’énormes quantités d’annihilations auraient dû être détectées. Il n’en est rien. Cependant, l’idée n’est pas morte pour autant. Si la gravitation avait un effet répulsif sur l’antimatière, les zones de matière et d’antimatière de l’Univers n’auraient plus de raison d’interagir et de s’annihiler. Trois expériences de haute voltige conduites au CERN, ALPHA-g, AEgIS et Gbar fabriquent des antiatomes pour les « peser ».

Le CERN dispose d’une infrastructure unique au monde pour produire des atomes d’antihydrogène pour faire des mesures sur l’antimatière. Ici une portion de l’anneau de décélération (AD)
crédits : CERN